Le mois d'avril s'est terminé avec un grand nombre de post sur la culture japonaise si bien que nous allons évoquer le sanctuaire de Kameido en avril sans réel retard car du 17 avril au 5 mai se tient la Fête de la glycine (Fuji).
Ce sanctuaire est particulièrement intéressant pour l'âme qu'il enchasse, mais aussi pour sa disposition et les éléments qu'il contient. Le sanctuaire enchasse l'âme d'un homme politique du IXème siècle (845-903), érudit et poète, Sugawara no Michizane , dont l'histoire est une parfaite illustration de à la fois de l'importance des Kami (divinités shinto) mais aussi des malheurs qui s'abattent si on les contrarie.
Portrait de Sugawara no Michizane
D'une grande famille d'érudits, il entre à la Cour impériale en 870 et travaille au Ministère de l'Intérieur (?), où grâce à sa maîtrise du chinois et son érudition il contribue à l'écriture de nombreux édits et correspondances impériales, et joue un rôle diplomatique important en recevant les délégations étrangères (de Chine et de Corée). En parallèle il enseigne la littérature avec le titre de Docteur le plus élevé dans la hiérarchie.
En 886, il est nommé gouverneur de la Province de Sanuki (actuellement Préfecture de Kagawa, à Shikoku).
En 888, il intervient en faveur de l'empereur Uda dans un incident entre celui-ci et des familles "rebelles", les Fujiwara.
L'empereur le récompense en le nommant ambassadeur en Chine en 890. Curieusement, il décide de la fermeture de l'ambassade arguant du déclin des empereurs chinois Tang.
Mais en 900, l'empereur Uda abdique, et la famille Fujiwara reprend de l'importance, et Michizane perd ses fonctions et ses titres et condamné à l'exil dans la province de Chikuzen (Fukuoka) par le nouvel empereur (Daigo).
Il y mourra en 903, et dès sa mort, la sécheresse s'empare du Japon, la peste ravage la cour impériale, le bâtiment principal du Palais Impérial est ravagé par la foudre, tous les fils de l'empereur Daigo meurent les uns après les autres, et la ville de Kyoto subit des inondations majeures.
Ces malheurs sont attribués à l'âme en colère de Michizane et pour adoucir ce courroux l'empereur décide de construire un sanctuaire pour enchasser son âme. Il lui redonne à titre posthume tous ses titres.
Ce sanctuaire s'appelle Kitano Tenmangu (où Kitano est le lieu).
Il semble que ceci n'ait pas été suffisant. En 970, Michizane est "promu" Dieu du Ciel et des Tempêtes sous le nom de Tenjin-Sama (maître des dieux du ciel) et devient "officiellement" un kami (un dieu), protecteur de la réussite scolaire et académique : il est populaire auprès des étudiants qui prient pour la réussite, car Michizane était un homme de grande érudition et de connaissance.
Dans le Shintoisme, un esprit insatisfait à cause d'un traitement injuste cherche vengeance et apporte destruction et malheur. Cependant, si il est suffisamment honoré et imploré, cet esprit néfaste se transforme en une divinité bienveillante qui apporte bonheur et réussite. Il est donc indispensable d'honorer les divinités et de ne jamais les contrarier.
De nombreux sanctuaires (Tenmangu) sont dédiés à Tenjin dans tout le Japon,
Dans ces sanctuaires on trouve toujours de la glycine et des pruniers : Michizane en partant en exil était triste de ne plus pouvoir admirer les pruniers de sa résidence. La légende explique qu'un prunier également triste de ne plus voir son maître s'est "envolé" jusqu'au lieu d'exil de Michizane. Cet arbre existe encore et on l'appelle le Tobi-Ume (Prunier volant) :
A Tokyo, au Kameido Tenmangu, on trouve également un prunier identique au prunier volant. Sous le prunier, ce sont les "ex-voto" achetés et déposés par les étudiants (ou leur famille) pour demander réussite aux examens.
On peut noter sur l'estampe, la fidélité de la représentation du sanctuaire
La semaine prochaine nous resterons à Kameido Tenmangu, et découvrirons plus en détail les différents trésors qu'il recèle.
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